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Préserver la santé mentale tout en prenant en charge la douleur : Témoignage de personnes vivant avec l’hémophilie

Il est tentant de considérer l’hémophilie strictement comme une affection physique. Pour la décrire  brièvement, elle implique des saignements, atteint les articulations et nécessite souvent des injections de médicament régulières.

Et bien qu’il n’y ait aucun doute en ce qui concerne l’aspect physique de l’hémophilie nous allons ici examiner un autre aspect non visible de l’hémophilie : la douleur qu’elle provoque, et dans quelle mesure elle pourrait entraîner des problèmes de santé mentale tels que la dépression, la colère et l’anxiété.

Les nombreuses formes de douleur liée à l’hémophilie.

La santé émotionnelle ou mentale est importante, et peut-être aussi primordiale que la  santé physique. Lorsque la santé mentale est altérée, les pensées, les sentiments et les comportements  peuvent se transformer en problèmes de vie plutôt que d’ouvrir une fenêtre à  travers laquelle appréhender et donner un sens à sa vie.

Il est difficile de gérer les symptômes physiques, mais encore plus difficile de le faire tout en  ayant peu d’énergie.

Heureusement, la communauté de l’hémophilie a déjà fait beaucoup pour  traiter et proposer des solutions aux problèmes de santé mentale. Examinons la situation avant de découvrir comment la santé mentale peut être  améliorée pour le bien-être de chaque individu.

1. Dépression et douleur

La douleur est l’un des symptômes les plus fréquents chez les personnes atteintes d’hémophilie. Dans une étude, 89 % des personnes atteintes d’hémophilie ont déclaré que la douleur avait interféré récemment avec  leur vie. Pour 50 % d’entre elles, la douleur est constante.

Presque autant de personnes atteintes d’hémophilie, soit 47 %, rapportent des  affections psychologiques ou psychiatriques.

Mais la douleur provoque-t-elle des problèmes psychologiques ? En cas de dépression, une affection psychologique  fréquente chez les personnes atteintes d’hémophilie, son lien avec la douleur a été  bien étudié. Selon une estimation, 1 personne sur 2 à 3 souffrant de douleur  chronique souffre également d’un trouble dépressif majeur.

Bien que le simple fait d’être atteint d’une maladie chronique puisse exposer une personne à un risque plus élevé de  dépression, pour certaines personnes atteintes d’hémophilie, l’impact sur le moral se manifeste soudainement.

Un jeune homme atteint d’hémophilie se souvient clairement du choc ressenti lorsqu’il a exactement découvert ce qui devait etre fait à propos de sa perte de mobilité et de masse musculaire :

Les professionnels de santé accompagnent les personnes atteintes d’hémophilie à relever  les défis de santé physique, mais aussi mentale. Cependant, en apprenant quelques mécanismes d’ adaptation, les personnes atteintes d’hémophilie peuvent trouver des ressources autres que le recours à des professionnels pour les aider  à gérer leurs sentiments tels que la tristesse. Prendre soin de sa propre santé mentale est une compétence  qui peut être acquise et gérée par soi-même comme dans le cas de Jonathan.

2. Colère et douleur

Pour beaucoup de personnes atteintes d’hémophilie, le chemin vers la guérison mentale passe par l’acceptation  et la compréhension.

Il est utile de reconnaître qu’il existe des raisons valables et compréhensibles de vulnérabilité  mentale et de problèmes de santé mentale. Règle numéro 1 : Ressentir des émotions désagréables ou indésirables n’est pas une faiblesse.

Qu’elle soit  diagnostiquée avec une dépression ou non, la colère est une émotion assez commune pour de nombreuses personnes atteintes d’hémophilie. La douleur freine les personnes dans leurs activités et peut  significativement réduire leur qualité de vie. Par conséquent, qu’une personne  ressente une douleur sporadique ou constante, il est compréhensible que cela puisse  la mettre en colère.

Et n’oublions pas que le simple fait de vivre en sachant que la douleur peut  interrompre les activités à tout moment peut être stressant et difficile non seulement pour les personnes atteintes d’hémophilie, mais  aussi pour leurs aidants et leurs proches.

Un autre jeune homme atteint d’hémophilie se souvient d’une expérience de douleur, survenue au cours d’une séance d’entraînement, comme d’un tournant particulièrement  désagréable dans sa vie :

Alors qu’au début, la douleur a eu des conséquences sur sa santé mentale (désespoir, deuil  et isolement social), Adolf a finalement pu surmonter  ses difficultés émotionnelles et retrouver son appétit pour la vie.

Il peut être utile de réaliser que, bien que ce sentiment soit normal pour les personnes atteintes de  maladie chronique, la colère n’est pas une émotion constructive. Comme la dépression, elle peut entraver les événements  positifs et priver les personnes atteintes d’hémophilie de l’état d’esprit nécessaire pour vivre et  espérer en grand.

Mais en découvrant comment surmonter leurs problèmes de santé mentale, les personnes atteintes d’hémophilie peuvent libérer de l’énergie  émotionnelle et l’utiliser de manière appropriée, à savoir pour réaliser des  choses passionnantes et épanouissantes.

Avant d’aborder la façon d’y parvenir, examinons un troisième  problème de santé mentale commun aux personnes atteintes d’hémophilie.

3. Anxiété et douleur

Se sentir anxieux est une réponse naturelle à la peur de perdre quelque chose de  précieux ou de cher. Du point de vue de la santé mentale, l’hémophilie peut  prendre une apparence menaçante et peut déclencher la peur de perdre :

  • de la mobilité ou des capacités
  • des relations sociales
  • de l’autonomie
  • de la sécurité financière

Outre ces craintes spécifiques liées à la perte, il semble y avoir une  association entre la douleur chronique et l’anxiété, que la douleur soit causée par  l’hémophilie ou non.

Comme pour les autres problèmes de santé mentale abordés ici, l’anxiété peut ne  pas affecter exclusivement les personnes atteintes d’hémophilie. Leurs proches et leurs aidants peuvent également avoir besoin d’un mécanisme d’adaptation pour atténuer l’ anxiété.

Et encore une fois, l’acceptation et la compréhension s’avèrent faire partie intégrante de  l’amélioration et de la préservation de la santé mentale. Un aidant, la mère d’un  nourrisson hémophile, écrit :

Lorsqu’on pense à la douleur, il est normal de supposer que son origine est physique et qu’elle n’aura un effet compromettant que plus tard sur la santé mentale de la  personne. Mais en situation d’anxiété, la douleur peut être déclenchée dans les deux sens. En effet, l’anxiété est connue pour exacerber (ou  du moins entretenir) la douleur causée par un problème physique tel qu’un saignement.

En ayant conscience de ce cercle vicieux, il est encore plus crucial d’avoir une stratégie pour soulager ses angoisses.

C’est dans ce sens que nous devons agir.

Promouvoir la santé mentale avec la thérapie cognitive

Tout d’abord, n’oubliez pas qu’il faut faire appel à un professionnel de santé qualifié pour  diagnostiquer un problème de santé mentale. L’auto-diagnostic n’est ni conseillé ni  possible, bien qu’on puisse observer correctement les symptômes de santé mentale.

Voici quelques symptômes indiquant différents problèmes de santé mentale :

Dépression

pessimisme, désespoir, fatigue, sentiment d’inutilité, insomnie, irritabilité,  pensées suicidaires

Colère

augmentation et accélération de la fréquence cardiaque, transpiration, grincement des dents, maux de tête ou maux d’ estomac, tremblements, étourdissements

Anxiété

sensation de nervosité, d’agitation ou de tension, augmentation de la fréquence cardiaque, sensation de danger  imminent, sensation de faiblesse ou de fatigue, envie d’éviter les choses  qui déclenchent de l’anxiété, de la transpiration

Alors, comment ces symptômes interdépendants peuvent-ils être traités ?

Examinons les avantages de la TCBPC (thérapie cognitive basée sur la pleine conscience), un système d’amélioration de la santé  mentale recommandé par le National Institute  for Health and Clinical Excellence et utile notamment dans le traitement de la douleur chronique, de la  dépression, de l’anxiété et de la panique.

La TCBPC aide les individus à remettre en question et réévaluer leurs pensées, sentiments  et comportements liés à leur douleur. Faire l’examen de ces aspects est la première étape pour remplacer par des réactions et des pensées constructives les pensées désagréables et indésirables.

Bien qu’une description complète de la TCBPC ne puisse pas être donnée ici, les 10  conseils ci-dessous peuvent être utiles pour inciter les personnes atteintes d’hémophilie à commencer au moins à aborder les  problèmes de santé mentale :

  • Prêtez attention à vos émotions et réactions. Lorsque vous vous sentez en  colère, frustré(e) ou triste, essayez de traiter la cause ou de minimiser  votre exposition à celle-ci.
  • Essayez de dire réellement à ceux qui vous entourent ce que vous  traversez émotionnellement. Garder vos sentiments pour vous peut entraîner du stress ou de la colère.
  • Prenez le temps de faire des choses positives. Soyez attentionné(e) et bienveillant(e) lorsque  vous programmez votre travail, vos loisirs et vos temps de repos.
  • Pardonnez-vous et pardonnez aux autres pour leurs erreurs. Essayez de remarquer activement les bonnes  choses et les gens sympathiques dans votre vie.
  • Concentrez-vous sur votre côté social. Établissez des liens avec des personnes serviables et  aimables. Les réseaux en ligne pour personnes vivants avec l’hémophilie peuvent être utiles.
  • Remarquez quand vous êtes engagé(e) de manière significative, et avec qui. Ensuite, essayez de  passer plus de temps à faire des choses qui ont du sens.
  • Faites de l’exercice régulièrement, mangez des repas sains et essayez de dormir suffisamment.
  • N’expérimentez pas de drogues ou alcools.
  • Apprenez la respiration profonde, la méditation ou essayez un entraînement de pleine conscience pour  gérer et vous protéger du stress.
  • Donnez-vous suffisamment de temps pour réfléchir avant d’agir ou de parler. Essayez de ne rien  dire, sauf si vous vous sentez aussi calme que possible.

Et n’oubliez pas que tout le monde est différent. Assurez-vous donc de  consulter votre professionnel de santé pour discuter de la manière dont la TCBPC peut VOUS être bénéfique.

En ce qui concerne la santé mentale, pour trouver l’issue il faut traverser...

Comme pour tout ce qui est précieux et significatif, résoudre une  situation de santé mentale n’est pas un travail rapide et facile. Bien au contraire, il est sage de l’ aborder avec humilité et patience.

D’autre part, voici quelques éléments qui peuvent vous rendre enthousiaste :

  • Au fil du temps, les progrès ne sont pas seulement possibles, mais ils sont probables.
  • Si nécessaire, votre professionnel de santé peut vous aider.
  • Pour de nombreuses personnes, la seule chose nécessaire pour atteindre une bonne santé mentale  est l’esprit lui-même.
  • En d’autres termes, aucun outil particulier n’est requis. Tout le monde  a au moins une chance de se battre.
  • Faire l’expérience de difficultés signifie probablement que vous faites quelque chose de bien. Ne vous découragez pas.
Références

Crane, R. S., & Kuyken, W. (2013). The Implementation of Mindfulness-Based Cognitive Therapy: Learning From the UK Health Service Experience. Mindfulness, 4(3), 246–254. https://doi.org/10.1007/s12671-012-0121-6

Ghavidel Parsa, P., Salehi, M., & Eshghi, P. (2020). Chronic pain in patients with hemophilia: is it different? Blood Coagulation & Fibrinolysis, 31(6), 345-350. doi: 10.1097/MBC.0000000000000917

Psycom. Chronic Pain and Depression. [Disponible sur https://www.psycom.net/depression/depression-signs-symptoms/chronic-pain-and-depression Consulté en octobre 2023]

Brod, M., Bushnell, D.M., Neergaard, J.S. et al. Understanding treatment burden in hemophilia: development and validation of the Hemophilia Treatment Experience Measure (Hemo-TEM). J Patient Rep Outcomes 7, 17 (2023). https://doi.org/10.1186/s41687-023-00550-6